Damian Penaud, anticonformiste jusqu’au bout des crampons
Par Gavin Mortimer
La France a toujours disposé d’ailiers hors norme depuis que le rugby est devenu professionnel. Les Bleus ont pu compter sur le « Goret » Philippe Saint-André, sur le « Renard argenté » Philippe Bernat-Salles, le fantasque Christophe Dominici, aussi brillant que torturé, le gendre idéal Vincent Clerc, ou encore Teddy Thomas, incroyablement talentueux, mais trop irrégulier.
Dans le lot, Damian Penaud est, si c’est possible, le moins conventionnel d’entre eux, tout en étant sans doute le plus prolifique. Depuis ces débuts avec l’équipe de France en 2017, le fils d’Alain (ancien ouvreur international), 27 ans, a planté 36 essais, ce qui le place à deux petites longueurs de la légende Serge Blanco (38 entre 1980 et 1991). Mais l’arrière avait besoin de 93 sélections, quand Penaud compile actuellement 53 capes.
En décernant à Penaud le titre de Joueur de la semaine la semaine dernière pour son essai et ses deux passes décisives lors de la victoire 34-14 de Bordeaux sur La Rochelle, le Midi Olympique l’a décrit comme « l’une des plus grandes machines à marquer des essais de l’histoire du rugby français ».
Au cours des huit saisons qu’il a passées en club au niveau professionnel, le joueur a inscrit 52 essais en Top 14 et 20 en Coupes d’Europe. La plupart ont été aplatis sous le maillot clermontois, mais cette saison, Penaud a fait profiter l’Union Bordeaux-Bègles de ses talents de finisseur. Depuis ses débuts avec le club girondin, en novembre 2023 au lendemain de la Coupe du Monde, il en est à 16 essais en 15 matchs (dont quatre en Champions Cup). Un rendement qui explique en bonne partie l’actuelle 3e place de l’UBB en Top 14.
Le grand public a découvert Damian Penaud en 2015, à l’occasion de la Coupe du Monde U20 pour laquelle il était sélectionné. Il a marqué deux essais lors de la victoire sur l’Angleterre (30-18), son partenaire chez les « grands » Bleus aujourd’hui, le Toulousain Thomas Ramos, s’occupant de botter les transformations. « Son potentiel physique est énorme, mais techniquement il lui reste du travail », jugeait à l’époque Fabien Pelous, le manager des U20. « Il a le potentiel pour atteindre le très très haut niveau. »
Penaud a aussi fait partie de l’équipe de France U20 en 2016, dans un groupe qui comprenait un certain Antoine Dupont. Deux mois seulement séparent les deux joueurs, et d’autres faits les lient étroitement. Dupont a été le 1101e joueur à représenter la France, Penaud le 1105e. Ce dernier compte aujourd’hui 53 sélections, le demi de mêlée 52.
Ils ont moins de points communs en ce qui concerne leur caractère. Dupont est déterminé, discipliné, motivé et réfléchi quand Penaud est plus relax. Cela se reflète dans leur présence sur les plateformes de médias sociaux.
Il y a quelque chose de rafraichissant et d’authentique chez Penaud. Il donne l’impression de se moquer de ce que diront les autres de lui, ce qui est rare à l’ère des réseaux sociaux où la plupart des personnalités sont très attentives à l’image qu’elles renvoient.
Penaud est un utilisateur irrégulier d’Instagram, alors qu’il a clairement laissé tomber X (anciennement Twitter) : il ne s’est pas adressé à ses 18 800 followers depuis février 2023. Le capitaine des Bleus, lui, compte plus d’un million d’abonnés sur les deux plateformes, et poste régulièrement des nouvelles, qui peuvent aller de campagnes publicitaires pour la marque de luxe Louis Vuitton au passage de la flamme olympique à Toulouse.
Penaud apparait plus souvent sur les réseaux sociaux de ses proches ou de ses coéquipiers, souvent parce qu’il est en train de s’amuser : il fait des grimaces à la caméra lors de la photo d’équipe, il entonne des succès pop en chantant horriblement faux, ou utilise son dentier pour gratter des jeux de hasard.
Il y a quelque chose de rafraichissant et d’authentique chez Penaud. Il donne l’impression de se moquer de ce que diront les autres de lui, ce qui est rare à l’ère des réseaux sociaux où la plupart des personnalités sont très attentives à l’image qu’elles renvoient.
Ce côté atypique se retrouve sur le terrain. Avec ses chaussettes baissées et son style de course indolent, Penaud est étonnamment rapide, même s’il n’a pas la vitesse fulgurante de l’autre ailier de Bordeaux et des Bleus, Louis Bielle-Biarrey. Ce que Penaud possède, c’est la vision offensive, la capacité à évaluer en une fraction de seconde ce qui se passe. C’est pour cela qu’il pèse autant offensivement.
L’une des statistiques les plus frappantes de la saison internationale 2023 est celle de sa capacité à échapper aux plaquages. Troisième, le Néo-Zélandais Will Jordan résiste à 34 % des plaquages qu’il subit. Le Géorgien Akaki Tabutsadze est deuxième avec 57 %. Penaud domine ce classement des joueurs insaisissables, avec 75 % de plaquages évités !
Ses courses imprévisibles, sa puissance du haut du corps expliquent cette capacité à s’échapper. C’est instinctif, mais c’est aussi une facette de son jeu qu’il a été encouragé à perfectionner depuis que Fabien Galthié est devenu sélectionneur, après la Coupe du monde 2019. En 2021, Laurent Labit, l’entraîneur de l’attaque des Bleus (passé depuis au Stade Français), a décrit cette philosophie en expliquant qu’il voulait que les ailiers français aient « une liberté totale. Ils peuvent dézoner et venir chercher des ballons ». Si cette capacité à se proposer aux quatre coins du terrain constitue une des forces particulières d’un joueur comme Gabin Villière, c’était « moins évident » pour Penaud, « qui reste trop souvent sur sa ligne », soulignait Labit.
« C’est un athlète, un joueur qui offensivement arrive à bien se placer et à utiliser des situations pas totalement claires, mais on aimerait que Damian fasse plus. Sur deux situations de turnover, au lieu de passer le ballon, il se déplace et perd un peu nos joueurs dans le circuit ». – Laurent Labit
Positionné trois-quarts en début de carrière, Penaud est toujours en phase d’apprentissage du poste d’ailier, qu’il occupe depuis 2021. Sur le plan du placement, il est désormais plus à l’aise sur l’aile, du moins sur offensivement. La seule faiblesse de son jeu réside dans la défense, que les meilleures équipes cherchent souvent à exploiter.
On l’a ainsi vu à la faute sur les deux essais marqués par Mark Tele’a lors du match d’ouverture de la Coupe du Monde 2023 France – Nouvelle-Zélande (27-13). Labit n’avait alors pas épargné Penaud dans son analyse d’après-match, pointant qu’il avait « aussi des domaines où il peut s’améliorer en défense ».
Il a également laissé entendre que Penaud était parfois un peu trop téméraire. « C’est un athlète, un joueur qui offensivement arrive à bien se placer et à utiliser des situations pas totalement claires, mais on aimerait que Damian fasse plus, indiquait l’ancien coach du Racing 92 au Parisien. Sur deux situations de turnover, au lieu de passer le ballon, il se déplace et perd un peu nos joueurs dans le circuit ».
« C’est un marqueur formidable, mais il est à 70 % de ce qu’il peut faire au niveau international. Il le sait et il doit travailler », prévenait Labit.
Cela peut sembler rude par rapport à sa contribution offensive, étant donné son remarquable ratio essais/matchs. Mais le joueur Penaud a besoin d’être encouragé, titillé. Durant ses premières années à Clermont, sa nonchalance a irrité plus d’un coéquipier. « Il pouvait arriver à l’entraînement en retard, en tongs et un œil encore fermé », se souvient Aurélien Rougerie dans une interview au Figaro. « Il a un talent fou donc ce n’était pas possible qu’il laisse passer cette chance. »
Incapable de se souvenir des lancements de jeu des trois-quarts, il rendait fou le demi d’ouverture Camille Lopez. Et selon un autre joueur de Clermont, Yohan Beheregaray, Rougerie devait parfois jouer le rôle de « policier », reprenant Penaud lorsque son niveau n’était pas à la hauteur des attentes.
C’est tout à l’honneur de Fabien Galthié de ne pas avoir bridé Penaud. Au contraire, il lui a donné une grande liberté offensive. Il y aura toujours à redire sur le plan défensif, car cela est contraire à sa nature d’être organisé et discipliné.
« Damian, c’est un électron libre… Il faut lui laisser sa liberté. Il aime avoir le ballon, chercher l’espace. Je ne vois pas à qui je pourrais le comparer. C’est un joueur unique », juge Thomas Lièvremont, qui a entraîné Penaud chez les U20 en 2016.
Ce qui le distingue aussi de ses pairs, c’est qu’il brille par son absence dans les médias autant qu’il brille sur les terrains. Rare en interview, Penaud ne cherche pas la lumière. Il veut juste jouer au rugby.
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Comments on RugbyPass
That is one helluva comeback!!! Hats off to the sheer bloody minded determination that must have taken. Hope he goes fantastically well at the T20 wc.
1 Go to commentsRayasi is now 7 or 8 years into his pro career, albeit one that started when he was young. At 27, as an outside back in NZ, he is probably closer to heading overseas than he is to the ABs. To get on the selectors radar he needs to have a great NPC, then another great SR campaign in 2025. Ben Lam was never really able to do that, he was a feast or famine type player. Three great games, then goes missing for the next 3.
11 Go to commentsDupont sees opportunities where there wasn’t one until he makes it so. Utter class.
2 Go to commentsThese are the guys that do the cohesion predictions? That will be a very interesting review and they have likely already told the Crusaders of their expections for them given such a young and inexperienced squad without all their injured and departed players. I wonder if any of that will get leaked out, perhaps only if the cohesion metric predicted such a season? Actually even that would like badly upon the backoffice, I suspect it likely we will never know what Gain Line Analytics made of this season now! Unless the PUs put its publication to vote?
12 Go to commentsCurrently across the super franchises the forwards choices for Robertson is in the luxury of the competitions depth for selection . However same can’t be said regarding selection of the backs, especially the inside backs. I believe that’s where his dilemma will be. If he can’t get mouanga for the start then he should forget him and move on.
30 Go to commentsIf they had another round up their sleeve then no doubt the sadas wouldv been top8. I say leave things alone and get into the next season I rekon the turn around will carry on.
12 Go to commentsSimilar to Arran Smith in his style of application.
5 Go to commentsSave your money. Just learn from the bad stuff and play better next year. Lost loads of key players and had half the team out broken for most of the season.
12 Go to commentsJosh Ioane has been great for opposition teams all season. The sooner the Chiefs unload him to MP the better.
11 Go to commentsMunster have very good back row stocks nowadays, lots of guys with very high potential. Okeke is unlucky not to get a contract. If he came along 10 years ago, he almost certainly would have. Could be very good for Coventry.
1 Go to commentsGreat article! Love that you point out so much that is positive, and back it up with quotes and clips.
1 Go to commentsNo scapegoats. No knee-jerk reactions. Just excuses in an expensive report under file 13. I’ll give the saders some free consulting - no planning after Razor. Just let things fall flat to rebuild. Easy.
12 Go to commentsJosh Bayliss was the early sub for Barbeary
1 Go to commentsHis deficiencies in defence must be major and beyond rebuilding because on attack he has a unique set of skills matched only by a combination of Mark Telea, Shaun Stevenson and Etene Nanai Seturo. His aerial and kicking game is next level and he displays a contempt for one on one situations. We've become obsessed with our no. 11 being a power weapon ignoring the better multi faceted option. Mark Telea is helping to change that mind set, Salesi Rayasi would advance that too.
11 Go to commentsWayne barnes should join the Queen
271 Go to commentsHope both you dirty mutts get cancer and die
41 Go to commentsOqueef was on the saffa pay roll , needs his head stomped
180 Go to commentsChiefs miss a tight 5 of serious grunt. Missing Guzzlers.scrum power and the Blues have spent the last.few yrs nicking their props. Will have to start better than recent matches to stop the Reds.
11 Go to commentsWith the civil war going on over in NZR you have to wonder if these guys can afford to throw money around on consulting firms? Consultants just going to charge them thousands for the privilege of telling them that the brain drain is hurting them, they played like pork chops & maybe some insights gleaned from reading the various rugby blog posts with a couple of graphs thrown in to dicky the report up. My suggestion is they forego the consultants and get a subscription to watch the URC, English Premiership, Top14 and EPCR competitions so that they can learn a bit from all the players and coaches that have left already NZ.
12 Go to commentsI am pleased about the progress of Canada and their recent success. What concerns me slightly is the the PWR league in England has become the breeding ground for other countries’ players with nearly half of Canada’s team playing there. Long term sustainability of good international teams depends on developing their own leagues and systems. They cannot rely upon England forever.
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