Agustín Creevy : cette fois, c'est bien la fin
Pas de regrets pour Agustín Creevy. À 40 ans et après 110 sélections, le talonneur argentin a définitivement raccroché les crampons après une carrière qui a traversé deux décennies et quatre Coupes du monde. Littéralement : son club de San Luis lui a offert une planche avec deux crochets pour y suspendre ses chaussures, geste qu’il a accompli devant ses proches après une ultime défaite contre Belgrano Athletic. « Il n’y a aucun regret », a-t-il lancé, ému, au moment de dire adieu.
San Luis, c’est là où tout avait commencé à 12 ans, dans les couleurs bleu et rouge de La Plata. Et c’est là que tout s’est terminé, au terme d’un dernier match perdu contre Belgrano Athletic, un samedi gris. La boucle était bouclée. « Je voulais jouer un dernier match dans le club qui m’a formé comme joueur, là où je me suis fait certains de mes meilleurs amis. San Luis, c’est ma vie. J’ai été heureux ici et le club a toujours été à mes côtés quand j’en avais besoin », a-t-il confié.
Agustín Creevy y el topetazo a Tomás Cubelli en lo que fue el último partido del hooker histórico de #LosPumas. 😱🇦🇷#URBATop12
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— ScrumRugby (@ScrumESPN) August 21, 2025
Il y a un peu moins d’un an, il annonçait sa retraite internationale. Mais quelques semaines plus tard, l’envie de jouer à nouveau le démangeait et, à 39 ans, il s’engageait avec le Benetton Trévise pour une année de plus ! Après 20 ans de présence sur les terrains…
Tout commence en avril 2004 où il débute en senior, deux mois avant de jouer avec Los Pumitas U21s. L’année suivante, il débute flanker contre le Japon. Deux capes en troisième ligne et l’avenir devant lui. Mais après une expérience frustrante à Biarritz (2007-2009), freinée par les blessures et le mal du pays, les portes se ferment. Los Pumas décrochent une médaille de bronze à la Coupe du monde 2007 sans lui. Santiago Phelan, alors sélectionneur, lui dit la vérité : pas d’avenir en flanker. S’il voulait survivre, il devait devenir talonneur. Creevy accepte.
« Tout ce que j’ai fait dans ma vie, c’était pour pouvoir jouer avec l’Argentine », répétait-il sans cesse. Alors il s’est réinventé. Retour à San Luis, apprentissage express du poste, patience et travail. En un an, il est devenu la doublure de Mario Ledesma. En 2011, il joue sa première Coupe du monde en Nouvelle-Zélande. Le pari fou est gagné.
Ensuite, la route devient planétaire. Clermont comme joker médical (2010), Montpellier pendant deux saisons (2011-2013), 43 matchs et un statut de chouchou grâce à son sourire et sa disponibilité. Passage par Worcester, où il vit une relégation sans quitter le navire, puis une remontée en Premiership. À Worcester, on le vénère encore.
Puis vint le temps des Jaguares. Franchise argentine en Super Rugby, Creevy en est la figure, le leader, la star. Salaire de cadre, rôle de capitaine et une finale en 2019 contre les Crusaders. L’un des plus grands moments de l’histoire récente du rugby argentin.
Avec les Pumas, c’est 110 sélections. D’abord capitaine, puis simple soldat quand Julián Montoya a pris le relais. Mais il n’a jamais cessé de soutenir ses successeurs. Même lorsqu’il a perdu sa place de titulaire lors de la Coupe du monde 2019, il a été le premier à encourager.
Il n’a pas non plus échappé aux creux de vagues. Mis à l’écart par Mario Ledesma, son ancien coéquipier, il a disparu des radars jusqu’à ce que Michael Cheika prenne les commandes et lui rende sa place. Il a ainsi disputé une quatrième Coupe du monde, en France en 2023, à 38 ans.
Quand les Jaguares ont disparu après le Covid, direction l’Angleterre, chez London Irish. Trois saisons pleines jusqu’à l’effondrement du club pour raisons financières. Ensuite Sale, où il jouait à Manchester tout en vivant à Londres avec sa femme et sa fille. Des allers-retours hebdomadaires, encore et toujours, pour continuer à être sur le terrain. Puis Benetton, sa dernière étape professionnelle, sept matchs en URC et un rôle de mentor.
Un talonneur qui courait comme un flanker, qui passait comme un trois-quarts, surnommé Sonny Bill pour ses offloads. Un joueur respecté jusqu’à ses adversaires : Keven Mealamu, double champion du monde, le saluait toujours avec la même admiration après leurs confrontations.
« Ce n’est pas un adieu, seulement la fin d’une époque », a-t-il insisté. « Je vais continuer à aider le club et à rester présent. Le rugby m’a donné la joie de jouer pour les Pumas et ça a toujours été mon drapeau. »
https://www.youtube.com/watch?v=OBgLPnoiBeU
Aujourd’hui, Creevy ne s’éloigne pas vraiment. Déjà reconverti en mentor, il s’est aussi lancé sur YouTube. Avec son charisme, son énergie et son franc-parler, il a tout pour exister sur un autre terrain : celui des caméras.
Il aura laissé l’image d’un Puma complet, généreux, combatif. Vingt et une saisons d’un voyage incroyable. Et au moment de tirer le rideau, il l’a répété encore une fois, comme une évidence : « J’ai tout donné au rugby. Il est temps maintenant de penser un peu aux besoins de ma famille. Je ne regrette rien, alors je suis très heureux que tout se termine là où tout avait commencé. »
Cet article publié sur RugbyPass a été adapté en français par Willy Billiard.
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