En France, la professionnalisation du rugby féminin se fait à pas feutrés
Boosté par l’exposition de l’équipe de France à la Coupe du monde, le rugby féminin français rêve de suivre le chemin du professionnalisme tracé il y a 30 ans par son homologue masculin en gardant les pieds sur terre.
“Il y a forcément des choses qui avancent, même s’il y a encore du boulot”, résume d’une phrase Céline Ferer, co-entraîneure du Stade Toulousain, à l’avant-garde de cette entrée dans le monde professionnel.
Une série de réformes du rugby féminin a eu lieu lors des dernières années pour déboucher, à l’orée de la saison 2024-25, à la constitution d’une poule unique, réunissant les dix meilleures équipes françaises au sein de l’Elite 1.
Du côté des clubs, les situations sont diverses, les plus puissants pouvant aligner les contrats fédéraux, qui concernent les joueuses liées à l’équipe de France à XV ou à VII. Leur salaire est assuré par la FFR pour une durée déterminée, un ou deux ans renouvelables en fonction des performances, avec un contrat à temps partiel (75%).
💙 Pour ce premier match, Serge Betsen, légende du rugby français, a transmis les maillots à nos Bleues.
Un symbole fort de transmission et de fierté de porter le maillot du #XVdeFrance.
🎥🍿 Extrait à découvrir dans le 2ème épisode d’Âmes Sœurs 👉 https://t.co/3hAZST6AE1… pic.twitter.com/MB4EUf7WQE
— France Rugby (@FranceRugby) August 26, 2025
Nouvelle vie
“Le contrat nous ouvre une nouvelle vie sur le monde professionnel et les entraînements quand on veut, quand on nous le demande”, assure Charlotte Escudero, troisième ligne des Bleues et du Stade Toulousain. “On s’entraîne beaucoup plus, on est beaucoup plus tournées vers la performance”, poursuit-elle. Ces contrats convoités par les joueuses sont cependant minoritaires, et la plupart d’entre elles doivent adapter, jongler avec leur vie rugbystique et leurs contraintes professionnelles pour gagner leur vie.
“Notre priorité, c’est de faire monter en puissance l’Elite 1 et les filles qui sont non internationales, et qui aujourd’hui composent des clubs d’Elite 1, leur donner un statut qui va leur permettre d’avoir une rémunération beaucoup plus importante”, affirmait en juin Jean-Marc Lhermet, vice-président de la fédération française de rugby.
“Autant les joueuses qui sont en équipe de France et qui ont un statut très clair, ce sont des choses qui tournent, autant autour des filles qui pratiquent dans l’Élite 1 féminine qui sont plus au niveau national, il y a encore quelques flous et ça, on doit le corriger pour faciliter l’accès au plus haut niveau”, ajoutait le dirigeant.
Un chemin déjà suivi par le Stade Toulousain, où des aménagements sont mis en place pour simplifier la vie des joueuses.
La prépa continue 🫡 pic.twitter.com/tgxU4bWAKe
— STFéminin (@STFeminin) August 14, 2025
Depuis deux saisons, le club rouge et noir a négocié avec les entreprises où sont salariées certaines de ses joueuses pour que ces dernières puissent travailler 80% du temps, et leur libérer ainsi deux demi-journées par semaine, tout en compensant financièrement les 20% de salaire manquants.
“Ce qui a été flagrant c’est sur l’aspect mental, ça c’est évident, même sur l’implication”, a constaté Céline Ferer, co-entraîneure des vice-championnes de France, qui voit dans cette démarche une possibilité de mieux s’entraîner, et d’éviter des journées à rallonge avec des séances effectuées après une longue journée de travail.
“Plus de moyens”
Les Toulousaines peuvent également s’appuyer sur les infrastructures du plus grand club français, ce qui est loin d’être le cas partout.
“Bordeaux est champion de France, mais notre salle de muscu est sous des gradins qu’on partage avec tout le Stade Bordelais Omnisport. La salle de sport, elle doit faire 25 mètres carrés, donc on est quand même sur des trucs encore ultra à l’ancienne”, témoigne auprès de l’AFP Joanna Grisez, ailière des Girondines et du XV de France.
🦁 ???????
Elles l’ont fait ! Elles sont doubles championnes de France 🤩
Les Lionnes du Stade Bordelais conservent leur titre au terme d’une deuxième mi-temps sensationnelle face à l’AS Romagnat (32-17) !
Félicitations à elles ! ❤️🔥 #iloveubb #FinaleElite1 pic.twitter.com/AqTz4y6bUc
— Union Bordeaux Bègles (@UBBrugby) June 8, 2024
“Il faudrait qu’on ait un championnat qui soit médiatisé pour pouvoir attirer plus de sponsors et plus de moyens. Pour pouvoir permettre aux filles d’être mieux installées, mieux structurées, mieux accompagnées”, insiste-t-elle, alors que de premiers matches d’Élite 1 ont été diffusés par Canal+ la saison dernière, avant que la finale ne soit diffusée en clair.
Les actrices et instances y voient un net motif d’espoir. “On veut avoir plus de ressources financières, très clairement, et c’est très lié à la visibilité parce que plus l’activité sera visible, plus la qualité des matches sera de haut niveau et plus on intéressera les partenaires”, souligne Jean-Marc Lhermet. L’argent, toujours le nerf de la guerre comme cela était déjà le cas pour les garçons il y a 30 ans. Un motif d’espoir, donc, quand on voit la puissance économique actuelle des deux divisions professionnelles du rugby masculin français.