Crise à Agen, révolte à Béziers : les joueurs mènent la fronde des vestiaires
D’un côté les joueurs réclament la tête de leur manager, de l’autre, ils la défendent. La fin de la saison 2024-2025 de Pro D2 laisse des traces en particulier pour deux clubs désormais en vacances. Certes le SU Agen a sauvé sa place in-extremis pour la saison prochaine (sa pire saison au classement, 14e) et l’ASBH ne s’en est pas trop mal sorti en terminant 7e. Mais les lendemains de soulagement mettent les tensions au grand jour. Et c’est lors de la même journée que tout a explosé.
Agen : les joueurs se mutinent contre Sébastien Calvet
Lundi 19 mai après-midi, on apprenait en effet que les joueurs du SU Agen avaient réclamé à leur président la tête de leur manager, Sébastien Calvet (49 ans). L’ancien sélectionneur champion du monde avec les U20, revenu avec toute la joie et la fierté qui s’impose dans son club d’origine à la fin de la saison dernière, pourrait finalement être débarqué manu militaru dans les jours qui viennent. Il avait pourtant signé un contrat jusqu’en 2027.

L’annonce prématurée (mais pas encore signée) de l’arrivée de l’ancien manager parti en 2019 Mauricio Reggiardo (aujourd’hui à Provence Rugby) en qualité de directeur sportif pour la saison prochaine a fragilisé l’équilibre. Calvet confiait alors : « Si je perds l’une de mes prérogatives, je ne resterai pas. » Finalement, il ne devrait pas rester, mais pour d’autres raisons (entre autres : 12 victoires pour 18 défaites).
Calvet avait déjà sauvé sa tête fin avril, mais la suite a continué d’être chaotique pour le 6e budget de Pro D2 (avec la 5e masse salariale) qui devait légitimement figurer dans le Top 6. Les joueurs lui reprochent trop de critiques, trop de commentaires dans la presse, une gestion trop participative, pas suffisamment d’explications…
« J’avais aussi fait le constat que le chef d’orchestre ne maîtrisait plus les musiciens… »
« Il m’avait laissé entendre, il y a trois semaines, qu’il avait perdu une partie du vestiaire », a admis le président Jean-François Fonteneau auprès de La Dépêche du Midi, évoquant « un acte fondateur quand les joueurs se sont rassemblés, il y a maintenant quinze jours ou trois semaines, entre eux. Je pense que personne n’a envie de repartir sur une saison plus compliquée. Tout le monde a envie de repartir sur de bonnes bases. » Fonteneau convoque une métaphore qui résume tout : « J’avais aussi fait le constat que le chef d’orchestre ne maîtrisait plus les musiciens ».

« Le groupe, dans sa grande majorité, a considéré que c’était compliqué de repartir avec Sébastien », a-t-il tranché auprès de nos confrères de Sud-Ouest. Un accord devrait être trouvé entre les deux parties, sachant que le président n’est pas prêt à signer un gros chèque de départ au manager qu’il avait recruté. « C’est évident que je ne vais pas lui payer deux ans de contrat. C’est certain même », a-t-il affirmé au Petit Bleu d’Agen.
A Béziers : les joueurs font bloc derrière Pierre Caillet
Net changement d’ambiance à près de 300 km de là où Béziers connaît lui aussi quelques remous… mais dans l’autre sens. Ce même lundi 19 mai, les joueurs de l’ASBH ont signé une lettre ouverte pour apporter tout leur soutien à leur manager Pierre Caillet (44 ans), viré par le président et le directeur du rugby du club, membres du pool d’investisseurs, qui lui ont clairement signifié leur manque de confiance à son égard.
Arrivé pour la saison 2020-2021, Caillet ne semble plus rentré dans leurs plans alors qu’il est au contraire très respecté par ses joueurs.

« Notre entraîneur n’est pas un simple technicien de passage, il est l’un des nôtres », écrivent-ils. « Ancien joueur du club, formateur auprès des espoirs, artisan de la remontée et de l’unité de ce groupe, il incarne l’identité biterroise dans ce qu’elle a de plus authentique : le travail, la passion, la fidélité.
« Il a façonné ce collectif avec des joueurs du cru qu’il a su accompagner jusqu’au plus haut niveau et avec lesquels il a redonné vie à une équipe au bord du gouffre. Lui et l’ensemble de son staff nous ont sauvés d’une relégation certaine, puis nous a emmenés jusqu’en demi-finale l’an passé. Grâce à lui, le club a retrouvé une âme, une fierté, une direction.
« Ce que nous vivons actuellement dépasse le cadre sportif. C’est un homme, notre coach, que l’on attaque. Un homme respecté, droit, investi, adoubé par la culture biterroise. »
« Par cette lettre, nous exprimons notre solidarité envers notre entraîneur, notre attachement à ce qui la construit et notre volonté de voir le club conserver son identité. »
Mais à la lecture de l’intégralité de la lettre ouverte, signée par l’ensemble du vestiaire, c’est plus largement une défiance envers les nouveaux propriétaires qui se pose. Et la fin de la saison laisse remonter les amertumes subies tout au long de l’année.
« Depuis l’arrivée de la nouvelle direction en octobre, nous, joueurs, avons été tenus à l’écart, jamais présentés officiellement, jamais écoutés, rarement soutenus lors des périodes critiques, comme lorsque nous faisions face à une vague de blessures, aucun joker médical n’a été sollicité », affirment les joueurs.

« Le groupe s’est battu seul et ce sont nos jeunes, issus du centre de formation qui ont répondu présents. Pourtant, ces mêmes jeunes ont vu leur contrat être proposé à la dernière minute dans des conditions minimales, pendant que d’autres joueurs extérieurs au club étaient reçus avec davantage de moyens.
« Aujourd’hui, nous sommes aussi inquiets pour demain. Le recrutement semble flou, voire inexistant. Plusieurs d’entre nous ne connaissent pas leur situation pour la saison prochaine. Jusqu’à la semaine dernière, certains ne savaient même pas s’ils allaient être conservés. Aucune communication claire, aucune sortie digne pour ceux qui ont tant donné à ce club. Un silence qui blesse.
« Ce que nous vivons actuellement dépasse le cadre sportif. C’est un homme, notre coach, que l’on attaque. Un homme respecté, droit, investi, adoubé par la culture biterroise. À travers lui, c’est aussi une vision du club, une dynamique collective, une aventure humaine que l’on met en péril. Nous avons mis des années à rallumer la flamme autour de l’ASBH auprès de nos supporters, de nos partenaires, de nos familles. Il ne suffira que d’un courant d’air pour l’éteindre. »
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