Carla Neisen (XV de France féminin) : "Je ne m'attendais déjà pas à être dans les 38"
Trois ans, c’est pas loin d’être une éternité dans la vie d’une joueuse de rugby. La dernière fois que Carla Neisen a porté le maillot du XV de France féminin, c’était le 21 avril 2021 pour un match du Tournoi des 6 Nations en Angleterre (10-6). Un pays qu’elle retrouvera sauf catastrophe dans moins de deux semaines pour participer à la Coupe du monde 2025, elle qui a eu le plaisir de voir son nom coché dans la liste final des 32 élues retenues par David Ortiz et Gaëlle Mignot pour prendre part à l’événement roi du rugby mondial.
Une douce surprise pour la capitaine de l’équipe de France à 7, qui aura l’occasion de se construire de nouveaux souvenirs en bleu un an après la déception des Jeux Olympiques de Paris 2025.
Comment avez-vous appris la bonne nouvelle de votre place dans la liste finale pour la Coupe du monde ?
“On l’a appris samedi matin, quand le staff a appelé les six filles qui n’étaient pas retenues. Il y avait de l’attente et on a pu déterminer comme cela qu’on était dans cette liste. Pour ma part, j’étais évidemment très heureuse. Il y a eu beaucoup de joie car il y a eu aussi pas mal de stress. Cette préparation a été longue et ce moment où on a eu la séance sur le terrain et la muscu avant l’annonce a été particulier. Honnêtement, je n’ai pas très bien dormi la nuit qui l’a précédé, pas plus que celle d’avant !”
Peut-on parler de surprise vous concernant ?
“Oui car les gens ne m’ont pas beaucoup vu à XV ces trois dernières années. J’étais avec le 7 et je débarque un peu au dernier moment. J’ai toujours voulu conserver le fait d’être joueuse dans mon club de Blagnac car c’est très important pour mon équilibre mais le fait de ne pas être reprise avec l’équipe de France depuis longtemps fait que je m’étais un peu résignée à faire une croix dessus. J’ai donné mon maximum avec Blagnac lorsque j’ai joué cette saison, tout comme je l’ai fait avec le 7, mais sans me fixer comme objectif d’être reprise avec le XV de France pour la Coupe du monde. J’étais déjà très surprise d’être dans les 38. Je ne m’y attendais pas et encore moins d’être dans les 32.”
Vous l’avez dit, vous étiez aussi sur le pont avec France 7 cette saison. Quand avez-vous trouvé le temps de jouer avec Blagnac ?
“J’ai pu faire le début de saison, jouer deux ou trois matchs puis je suis partie avec le 7 et j’ai pu revenir en club pour la fin de saison. J’étais remplaçante lors de la demi-finale d’Élite 1 contre Toulouse et c’est après ça que j’ai été contactée pour intégrer la première liste des 38. Encore une fois, ça a été une belle surprise.”
L’arrachage de Romane Ménager, la conclusion de Carla Neisen… les Bleues sont inarrêtables 🔥
Que de puissance dans cette rencontre à sens unique (27-0).#rugby #HSBCSVNS #HSBCSVNSHKG pic.twitter.com/46PGvOO12W
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“Je n’ai pas revu notre quart de finale des JO et je pense que je ne le reverrai pas”
Avez-vous eu besoin de temps pour évacuer la déception des Jeux Olympiques de Paris, et cette élimination en quart de finale avec France 7 ?
“Après les JO, j’ai connu une période assez compliquée. Ce résultat a été dur à encaisser et il y a eu plein de moments de doute. C’était aussi la fin d’un long cycle et le début de saison a été compliqué mais il a fallu rebasculer.”
Ressentez-vous depuis le début de la préparation une forme de curiosité de la part de vos coéquipières concernant votre statut d’athlète olympique ?
“Forcément, les filles demandent quand on est à table, notamment comment s’est passée la cérémonie. Et je suis contente d’en parler aussi parce que ces moments resteront gravés à jamais quoi qu’il arrive. On y était, on les a vécus et on ne pourra pas les enlever ni les effacer même si le résultat n’a pas été à la clé. Après, les filles savent aussi que cela a été un moment dur donc elles ne tapent pas trop là-dedans. Personnellement, regarder des vidéos de ce qu’il s’est passé, je n’y arrive pas trop, je zappe. Je n’ai pas revu le quart de finale et je pense que je ne le reverrai pas car je n’ai pas envie de me replonger dedans. Cela a été assez dur comme ça. Il faut avancer et cela a été important de le faire même si c’est dur et que cette plaie sera toujours un peu là.”
Sur la préparation physique en elle-même, vous êtes vous sentie plus à l’aise que vos coéquipières du fait d’être habituée à la très haute exigence du 7 ?
Non, c’était dur pour tout le monde ! Les intensités sont élevées et il a aussi fallu pour ma part reprendre mes marques avec le XV. Au début, j’ai pu avoir tendance à courir un peu partout alors qu’il y a des courses qui ne sont pas nécessaires. Même si on est habituées à courir beaucoup avec le 7, les contacts sont bien plus nombreux à XV et cela fait quand même la différence.
“Je me sens bien et j’ai hâte que ça commence”
Vous portiez le numéro 13 lors de votre dernière sélection avec le XV de France en 2021. Est-ce toujours sur ce poste de deuxième centre que le staff compte sur vous pour cette Coupe du monde ?
Je m’entraîne plus en tant que 12 depuis le début de la préparation physique mais je peux jouer les deux. Je m’adapterai à ce que le staff me demande. Je me sens bien et j’ai hâte que ça commence.
Est-ce dur désormais de ne pas succomber à la tentation de se “gérer” jusqu’à la Coupe du monde pour écarter le risque de blessure ?
“Non car j’ai toujours considéré qu’on joue comme on s’entraîne. Il ne faut pas tomber dans le truc de se dire qu’on va mettre moins d’intensité car c’est souvent là – et je touche du bois – que le malheur arrive. Donc je m’engage à fond.”
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— France Sevens (@France7s) May 14, 2023
Quid de la suspension, alors que se profile l’Angleterre en test-match, une équipe qui a failli perdre sa capitaine pour un déblayage mal maîtrisé contre l’Espagne ?
“J’essaie de ne pas y penser, ni de voir l’action que vous évoquez. Je tourne la tête ! Si on y pense, on rentre dans un cercle vicieux avec de mauvaises ondes donc il ne vaut mieux pas. Je ne dis pas que c’est facile mais il faut éviter.”
Vous avez déjà connu une Coupe du monde, en 2017. Qu’est-ce que vous en gardez et en quoi la Carla Neisen de 2025 est différente de celle de 2017 ?
“Il y avait autour de moi une autre génération, avec des joueuses comme Elodie Poublan ou Caroline Ladagnous. Moi, j’étais très jeune et je ne me posais pas de question. J’étais heureuse de jouer, tout simplement. Aujourd’hui, ça me fait un peu bizarre de me dire que je fais partie des plus anciennes, même si je n’ai que 29 ans et ne suis pas la plus âgée du groupe ! Je ne sais pas si j’ai changé mais j’ai évolué sur plein de choses. Sur le terrain, je crois avoir progressé et en tant que femme, j’ai aussi appris et évolué sur pas mal d’aspects que je ne vois pas du tout pareil qu’à l’époque.”