Occasion manquée ou rendez-vous repoussé pour les Bleus ?
Ils y ont cru, encore une fois. Et ils ont résisté, longtemps.
Mais, comme à Dunedin, comme à Wellington, le XV de France s’est finalement incliné samedi à Hamilton (29-19) face à des All Blacks plus réalistes et mieux armés. Trois tests, trois défaites, et une tournée qui s’achève avec autant de fierté que de regrets pour une équipe privée de ses cadres et lancée dans un défi démesuré.
Pendant une mi-temps, les Bleus ont tutoyé l’exploit. Solides dans les duels, efficaces dans les zones de ruck et dangereux ballon en main, ils ont pris l’avantage au score jusqu’à mener 19-10. Une première période exemplaire… jusqu’à cette ultime minute avant la pause où les Néo-Zélandais ont profité d’un moment de flottement pour inscrire un deuxième essai, malgré les protestations françaises. Un tournant.
« L’essai qu’on prend en première période, c’est un cadeau. Mauvais positionnement, mauvaise communication », a reconnu Fabien Galthié, avant d’évoquer une défense ensuite « héroïque », capable de réaliser près de 300 plaquages sur le match.
Mais les vagues noires ont fini par noyer l’espoir. Dès le retour des vestiaires, les Français ont été acculés. Les statistiques parlent d’elles-mêmes : 66 % d’occupation néo-zélandaise, près de 60 % de possession sur l’ensemble du match, et même 88 % dans les dix dernières minutes. La France n’a jamais rompu mentalement, mais a fini par céder physiquement.
Malgré tout, les tricolores ont affiché une solidarité remarquable. « Durant la tournée, j’ai appris que n’importe quelle équipe de France pouvait relever le défi », a salué Gaël Fickou, de retour dans le groupe pour ce troisième test. « Ce n’est que partie remise », a-t-il lancé, à l’adresse des All Blacks et de ceux qui doutaient de cette jeune garde.
Le mérite sans le miracle
Pierre Bourgarit, l’un des leaders de cette tournée, a lui aussi pointé la frustration d’être passé si près : « Même si le score ne le reflète pas trop, je pense qu’on est passé pas loin de pouvoir y croire jusqu’à la fin, même pourquoi pas de faire un exploit. »
Mais si les Bleus ont tenu le choc durant cinq mi-temps sur six, jamais ils n’ont semblé en mesure de gagner sans un scénario très favorable. À Dunedin (31-27), les All Blacks avaient multiplié les fautes de main et s’étaient vu refuser trois essais à la vidéo. Samedi à Hamilton, malgré une équipe largement remaniée, les Néo-Zélandais ont dominé le rythme et la maîtrise technique.
Au total, ils ont franchi la ligne à huit reprises, dont quatre fois sans que l’essai ne soit accordé, la défense française parvenant in extremis à interférer entre ballon et sol. Preuve d’un engagement irréprochable, mais aussi d’une défense trop souvent sous pression.
Un groupe méritant, mais incomplet
Le XV de France n’a pas démérité. Mais il lui a manqué ce supplément de talent, cette expérience, ces repères collectifs qui forgent les grandes victoires. L’absence des titulaires habituels, restés en France ou déclarés forfaits pour cause de blessure, s’est fait sentir. Et Galthié, interrogé sur l’issue possible de cette série avec ses meilleurs éléments, n’a pas souhaité entrer dans ce jeu de fiction : « Ce n’est pas le moment. C’est gênant de parler de ça avec les gars qui se sont battus pendant cinq semaines pour relever le défi. Il faut quand même respecter ces joueurs qui ont été exceptionnels, valeureux et solidaires. »
Car c’est bien là le paradoxe : une équipe B, valeureuse mais incomplète, envoyée au front contre la meilleure nation du monde rugby. Le vivier est riche, mais encore insuffisant pour tenir tête à des triples champions du monde sur leurs terres.
Rendez-vous manqué… ou reporté ?
La réalité du rugby français, c’est aussi celle du Top 14, dont les clubs ont déjà repris l’entraînement pour une saison qui démarre dès début septembre. Et c’est peut-être la dernière fois avant 2027 — et une hypothétique confrontation lors du Mondial en Australie — que la France aura l’opportunité de défier les All Blacks chez eux.
En attendant, cette tournée laisse un goût amer. Pas celui de l’humiliation, mais celui d’une chance entrevue, d’une promesse esquissée… et repoussée à plus tard.

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